samedi 13 septembre 2014

J'avais presque oublié comment les pros de la santé pouvaient être relous


L'autre fois je me suis retrouvé aux urgences, et sur le coup je flippais pas qu'on me fasse chier avec mes papiers, parce que je sortais d'un labo d'analyse où la secrétaire avait fait gaffe de dire à l'infirmière de ne pas m'appeler « madame » quand ça serait à mon tour (j'étais pas dans mille labos, mais à Rennes, dans les labos où j'étais, c'était à chaque fois comme ça) sans m'avoir rien demandé, et de chez un médecin à qui j'ai dit que j'étais trans parce qu'il m'a demandé à quoi correspondait mon ALD, et il écrit « Mr » sur les ordonnances sans me poser de questions non plus. Donc bref, j'arrive aux urgences stressé et surtout super fatigué parce que j'avais bien mal et que je flippais comme je ne savais pas ce que j'avais, et j'entre et y'avait 6 ou 7 personnes derrière le guichet d'accueil. 

Y'a un infirmier qui me dit de venir, qui me dit que j'ai une drôle de couleur et d'aller vite m'enregistrer. Je vais au guichet à l'autre bout de la salle, je file ma carte vitale, la secrétaire pose des questions banales et me dit de retourner à l'accueil. J'y retourne et je vois que les gens derrière le guichet sont un peu en train de se marrer, mais bon, peut être juste qu'il-le-s se sont raconté une blague. Un mec me fait rentrer dans la salle juste à côté de l'accueil, je pose mon sac et il me dit d'aller le poser dans la salle d'attente parce que il faut éviter de mettre trop de trucs dans cette salle. Je ressors et dans l'encadrement de la porte y'a une infirmière qui me regarde avec un air genre amusé/ironique/un truc désagréable dans le style dans ce contexte. Je reviens sans mon sac, l'infirmière s'est installée dans la salle (et en vrai, je ne sais pas pourquoi elle était là à part pour faire chier, parce que y'avait clairement pas besoin qu'il-le-s soient deux pour prendre ma température et me poser 3 pauvres questions). L'infirmier commence à me poser des questions sur mes symptômes, l'autre est toujours en train de me fixer d'un air narquois, en regardant de temps en temps mon dossier.

Et puis soudain, paf, c'est parti (coupant le mec qui allait me demander de lever le bras pour mettre le thermomètre sous mon aisselle). « C'est quoi votre prénom? » Je réponds. « Mais ça s'écrit avec -le ? ». Ouais. Elle se marre. « Vous avez eu un problème hormonal? » Heu nan, je suis trans, mon état civil est pas changé. (Là l'infirmier avait réussi à caser son thermomètre, il me dit que j'ai de la fièvre, que j'ai pas l'air bien et qu'il va chercher un brancard parce qu'il avait peur que je me vautre. L'autre, ça l'a pas arrêtée le moins du monde. Le fait que j'ai du mal à parler non plus par ailleurs.) « Oh ben c'est fou. Vous essayez de devenir un gars en fait? » J'ai pris l'air le plus blasé que je pouvais compte tenu de mes capacité en matière de théâtre qui sont déjà pas terribles, mais quand j'ai pas bu ni mangé depuis 15h et que j'ai pas dormi, c'est encore pire. Après je sais plus ce qu'elle m'a demandé, mais elle m'a parlé au féminin, elle s'est reprise, ça l'a fait marrer, elle a dit un truc comme « haha ben maintenant je suis perdue désolée, parce que j'ai votre prénom là alors vous comprenez ». Je lui ai envoyé le regard le plus méchant que je pouvais parce que mon sens de la répartie était décidément pas au top de sa forme. « Oui ben désolée hein, je pose des question, j'me coucherai moins conne ce soir ». Là j'ai quand même réussi à dire quelque chose comme « Ben j'espère oui ».

Bref, c'était sympa comme tout. Ça a déjà tendance à me gonfler prodigieusement quand on me pose des questions alors qu'on ne se connait pas, genre comme si j'étais une encyclopédie sur pattes et que j'avais que ça à faire que de répondre aux interrogations des cis, mais quand c'est des professionnel-le-s de santé et que je viens pour quelque chose qui n'a strictement aucun rapport et que je suis mort de trouille parce que j'ai peur être un abcès dans la gorge, j'ai définitivement autre chose à foutre que de faire un cours en accéléré sur le thème « tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur les trans sans jamais vous bouger le cul pour aller chercher des informations par vous même, bande d'abrutis ».

Rapide réflexion sur les tours de présentation

Bon, ça fait des lustres que j'ai pas posté. J'ai pondu deux trucs vite faits aujourd'hui, j'ai envie d'écrire d'autres choses, mais j'arrive pas trop, alors qui vivra verra pour la suite. Donc ça, ce sont des réflexions que je me suis fait pendant des ateliers, des réunions ou des groupes de paroles.


Souvent, et je trouve ça cool, quand on commence une discussion en groupe, un tour de table est proposé, et on dit souvent « vous pouvez donner votre prénom et le pronom par lequel vous préférez être désigné-e ». En gros, j'ai vu deux cas de figure qui me posent problème quand le tour de présentation commence :
  • Les personnes trans donnent leur pronom et leur pronom, et les personnes cis donnent juste leur prénom. Je trouve ça très mal venu en fait, ça fait genre « ben moi je suis cis, ça se voit, c'est évident comment on doit me genrer ». Hé coucou, en fait y'a des personnes trans qui se font mal genrer parce que les gens présupposent qu'elles sont des personnes cis en fonction de critères cis-centrés, et que justement non, tout le monde n'est pas cis.
  • Tout le monde donne son prénom et son pronom, sauf que plusieurs personnes cis vont dire des trucs genre « oh moi vous pouvez me dire « il » ou « elle », ça n'a aucune importance », ou encore (j'adore celle-là...) : « genrez moi comme vous voulez, je vais pas vous mordre, on s'en fout, hahaha ». J'ai entendu des trucs comme ça plein de fois ces derniers temps, et juste ça me gave. Ces personnes (y'a sans doute des exceptions hein, je dis pas, et je re-précise que je parle de personnes cis, qui en plus ensuite pendant tout l'atelier vont utiliser tout le temps le pronom qu'elles utilisent au quotidien) vivent dans un genre qui leur convient depuis leur naissance environ, et lancent un truc comme ça, le genre c'est pas important, ça se déconstruit, blablabla. Je trouve ça trash pour moi, en tant que trans, qui a dû batailler (et qui bataille encore parfois, avec certaines personnes, genre dans ma famille, ou récemment une infirmière) pour qu'on me genre correctement, et qui parfois ouais a eu envie de mordre des gens (enfin non, je mords pas des gens qui m'énervent, mais j'ai envie de leur donner des coups de pelle) quand on nous genre mal. Alors quand c'est pas ton cas et que t'as jamais eu à te battre pour qu'on utilise les pronoms que tu voulais, juste, tes remarques sur « les pronoms c'est pas important » ben tu peux aussi te les garder.
Si tu t'en fous de comment on te genre, ben c'est cool pour toi, y'a pas de soucis, mais les remarques qui laissent penser que pour les gens pour qui ça a de l'importance de se faire genrer d'une manière et pas d'une autre sont trop nul-le-s, n'ont pas déconstruit je ne sais pas quoi autant que toi, et sont violent-e-s (sérieux, j'ai entendu ce truc de « je vais pas vous mordre » ou des choses comme ça un paquet de fois en vrai), ben en fait c'est pas nécessaire et c'est chiant.

jeudi 9 janvier 2014

Joyeux anniversaire à moi!

Je profite de mon anniversaire d'opération pour faire une petite mise à jour.

Y'a un an à cette heure-ci j'étais à peu près en train de ne pas arriver à arrêter de trembler en salle de réveil depuis 3 heures, et ça devait être à peu près le moment où j'ai cru que ma gorge avait méga gonflé quand on m'a injecté de la morphine avant que je ne me re-réveille 2 heures plus tard et que je reparte enfin dans ma chambre.

J'avais parlé un peu, avant l'opé, du fait que je flippais un peu de comment j'allais gérer l'"après", et puis en fait j'y ai très peu pensé finalement, à comment c'était avant, et c'était pas en mode nostalgique. Je suis vraiment content de l'avoir fait, du résultat et de ne plus avoir à penser à ça tous les jours.
Par contre c'est dingue comme c'est vite passé, la période pendant laquelle je me disais que j'étais super content de ne plus avoir de binder, j'ai zappé assez vite comment j'en pouvais plus sur la fin.
Bref c'est cool, je suis content de pouvoir aller à la piscine, de pouvoir m'habiller plus comme je veux et d'être satisfait de l'apparence de tout ça. Y'a des imperfections hein, le côté gauche est un peu creux et le droit un peu bombé, mais je m'en fous. J'ai toujours un peu mal la nuit de temps en temps, mais c'est ciblé sur les cicatrices horizontales et ça doit être lié à ma manière de cicatriser (vu les cicatrices en elles mêmes sont toujours assez gonflées et rouges, mais ça s'estompe doucement). Je mets de la crème pour les hydrater tous les jours, c'est devenu un réflexe.

Sinon, ça fait aussi un an que j'ai décidé d'arrêter les hormones (que j'avais arrêtées en prévision de l'opération un ou deux mois au paravent je crois). Pour le moment ça me convient comme ça. Je ne sais pas ce que ça donnera plus tard, mais là l'idée de voir un endoc (ou globalement un médecin) me donne mal au bide, donc ça tombe bien. Je ne vis pas forcément bien le fait d'avoir de nouveau mes règles (en vrai, je le vis plutôt mal), mais en même temps je vivais mal d'avoir mal au cul pendant 3 jours après chaque injection, de me piquer, et d'être naze avant mes injections dont je n'arrivais pas à respecter la date parce que je supportais de moins en moins les piqures, donc bon.
Au début j'avais une peur irraisonnée que si je me rase, ma barbe ne repousse pas, mais en fait si (même si elle est peut être un peu moins épaisse qu'avant, mais j'en suis pas sûr).

Des fois je me dis que ça aurait été bien de continuer pour obtenir une répartition des graisses, mais ça avait pas bougé du tout en 1 an et demi, et je pense que de toute façon, j'ai plein de complexes à la con et que du coup, hanches ou pas, je complexerai toujours sur un truc, donc il vaut mieux que je me concentre sur le fait d'apprendre à vivre avec plutôt que de mettre des espoirs dans la testo, alors que dans l'immédiat ça me gonflerait d'en reprendre.

Sinon, ma vie va relativement bien, j'ai changé de filière à la fac et je me sens mieux dans celle-là (les gens me font moins peur). Là, j'ai l'impression d'être grave sociable en ce moment, je suppose que c'est lié en partie aux anxiolytiques et en partie au fait que d'avoir arrêté de militer (enfin pas arrêté entièrement, m'enfin sur pourquoi je ne veux plus organiser des actions sur des trucs trans avec des cis, je pourrais tenir 50 pages je pense) et de lire des trucs qui m'énervent et passer mes soirées à m'engueuler avec des gens, ça m'a aussi permis d'être un peu plus calme et moins anxieux.